À la veille de la Conférence internationale sur la diversité biologique, la Suisse à la traine
Lors de la Conférence de l’ONU sur la diversité biologique ces deux prochaines semaines, les États membres vont présenter leurs plans nationaux pour sauvegarder la biodiversité. La Suisse se retrouve décrédibilisée, car elle ne dispose pas d’un Plan d’action Biodiversité efficace, doté des mesures indispensables pour protéger les bases naturelles de la vie sur son propre sol.
La Conférence de l’ONU sur la diversité biologique (CBD COP16) s’ouvre le 21 octobre. Elle sera l’occasion de dresser un bilan des mesures que les États membres ont inscrites dans leurs plans d’action pour atteindre les 23 cibles du Cadre mondial de la biodiversité décidées ensemble il y a deux ans. La communauté internationale a fixé le délai à 2030. La Suisse a adopté ces objectifs et sa législation nationale lui impose également d’en faire plus pour sauvegarder la biodiversité, la base de notre vie.
Délai non respecté, mesures annoncées totalement insuffisantes
Depuis, 83 pays ont adapté leurs plans nationaux pour concrétiser les objectifs de biodiversité ou ont défini de nouveaux objectifs nationaux. Parmi eux, trois voisins de la Suisse: la France, l’Italie et l’Autriche. Mais notre pays n’a pas respecté le délai et a déjà laissé s’écouler un quart du temps imparti sans initier les mesures efficaces nécessaires, pour ne pas parler de les mettre en œuvre.
Les projets du Plan d’action Biodiversité connus jusqu’ici sont tout à fait insuffisants. Au lieu de prendre des mesures pour protéger et restaurer la nature dans les zones urbaines, les forêts, les campagnes et les milieux aquatiques, il n’est question que de mener de nouvelles études ou de constituer des bases supplémentaires. L’état de la recherche montre pourtant clairement que la Suisse a assez de connaissances sur la biodiversité pour pouvoir agir immédiatement.
Avec un tel plan d’action, la Suisse ne peut ni atteindre ses propres objectifs de biodiversité inscrits dans sa Constitution et ses lois, ni contribuer de façon significative aux objectifs mondiaux communs. Ajoutons que cette année même, le Conseil fédéral et le Parlement ont supprimé au dernier moment un crédit de 68 millions de francs annuels pour la nature déjà décidé dans le plan financier. Ce qui fait craindre une détérioration catastrophique de la qualité des aires protégées existantes pour des décennies.
La Suisse jouera-t-elle franc jeu lors de la Conférence sur la biodiversité?
Nonobstant la situation désolante du plan d’action Biodiversité et l’affaiblissement en cours de la protection de la nature en Suisse, le Conseil fédéral se montre ambitieux sur le plan international : il veut s’engager en faveur de la mise en œuvre des objectifs de biodiversité à l’échelle mondiale et soutenir la création d’un mécanisme de contrôle permettant d’apprécier les effets des mesures nationales et d’en tirer des enseignements. Il reste à voir si la Suisse communiquera honnêtement sur ses propres mesures insuffisantes lors de la Conférence.
«Il est inadmissible qu’on exige d’autres pays beaucoup plus pauvres qu’ils en fassent davantage pour protéger la biodiversité, alors qu’on a soi-même négligé ses devoirs», critique Friedrich Wulf, responsable de projets Politique de protection de la nature chez Pro Natura. «Notre pays doit certes s’engager plus vigoureusement pour les objectifs mondiaux de biodiversité. Mais le Conseil fédéral et le Parlement sont surtout tenus par notre législation de sauvegarder nos bases de vie en Suisse même, où elles sont particulièrement menacées», souligne Raffael Ayé, directeur de BirdLife Suisse.
Informations complémentaires :
Convention on Biological Diversity (cbd.int)
Contacts :
- Pro Natura: Sarah Pearson Perret, directrice romande de Pro Natura, 079 688 72 24, sarah.pearsonperret@pronatura.ch
- BirdLife Suisse: François Turrian, directeur romand, 079 318 77 75, francois.turrian@birdlife.ch
- WWF Suisse: Sophie Sandoz, Chargée de communication pour la Suisse romande, 021 966 73 71, sophie.sandoz@wwf.ch