25 août 2023 — Communiqué de presse

Les cantons vont-ils embrasser aujourd’hui l’avenir énergétique?

Les directeurs cantonaux de l’énergie ont le pouvoir d’éliminer bientôt un quart de toutes les émissions de CO2 de la Suisse, comme par magie. Pour cela, ils doivent adopter un projet percutant à leur assemblée plénière et forcer à agir les cantons qui traînent les pieds.

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Solar auf dem Dach
  • Les cantons jouent un rôle central dans la protection du climat: par le biais de leurs lois sur l’énergie, ils déterminent la quantité d’énergie que les bâtiments suisses consomment pour le chauffage et le réchauffement de l’eau, ainsi que la quantité de CO2 qu’ils émettent. En 2021, cela représentait 38% de la consommation énergétique suisse et 24% des émissions.
  • Quelques nouvelles mesures dans les lois cantonales sur l’énergie suffiraient à freiner cette faim d’énergie démesurée et à réduire rapidement les émissions nocives de CO2. Un effort indispensable pour le climat et la sécurité d’approvisionnement en électricité.
  • La Conférence des directeurs cantonaux de l’énergie (EnDK) propose une variante minimale pour les différents cantons avec un modèle de loi sur l’énergie (MoPEC). Ceux-ci doivent s’en inspirer lors de la rédaction de leurs lois ou aller plus loin. La dernière version du MoPEC date de 2014. Il est donc urgent de le mettre à jour. C’est ce que décide aujourd’hui l’EnDK. Le WWF résume les solutions que la mise à jour d'aujourd'hui devrait impérativement inclure.

Citation de Thomas Häusler, chef de projet Climat et énergie, WWF Suisse
«Tout le monde profite des bâtiments efficaces et sans émissions: les habitant·e·s et les propriétaires avec plus de confort et des frais annexes moins élevés, mais aussi le climat avec des émissions de CO2 plus faibles. Il est donc grand temps que les directeurs de l’énergie et les cantons prennent leurs responsabilités et adoptent des lois efficaces sur l’énergie.»

Le passage à un avenir prometteur en cinq règles

La mise à jour doit intégrer ces règles pour que la loi ait un impact maximal:

-- Plus de nouveaux chauffages à mazout et à gaz
-- Remplacement des chauffages électriques
-- Energie solaire pour tous les bâtiments
-- Fin du gaspillage énergétique pour tous les bâtiments
-- Obligation de planification énergétique au niveau communal

Plus de nouveaux chauffages à mazout et à gaz
Lorsque le propriétaire d’une maison individuelle remplace son ancien chauffage fossile par un nouveau chauffage à mazout ou à gaz, ce dernier va polluer l’atmosphère pendant les 15 à 20 prochaines années en émettant 60 à 100 tonnes de CO2. Nous ne pouvons plus nous le permettre. En effet, pour réaliser l’objectif de 1,5 degré de l’Accord de Paris sur le climat, chaque tonne de CO2 compte.
Les cantons de Glaris, Bâle-Ville et Zurich ont démontré que sur le plan technique et politique, il était possible d’interdire la construction de nouveaux chauffages fossiles. Ils ont déjà introduit cette mesure, qui n’a pas posé de problème. Une nouvelle étude de l’EnDK montre que cela fait une différence si un canton interdit les chauffages fossiles ou s’il exige seulement, comme dans le MoPEC actuel, une part de combustibles renouvelables. La conclusion de cette étude est la suivante: «Il est clair que les prescriptions actuelles ne suffisent pas […]. Il faut en principe une obligation d’utiliser 100% d’énergies renouvelables dans tous les bâtiments.»

Remplacement des chauffages électriques
Les chauffages électriques sont énergivores. Pourtant, près de 143 000 d’entre eux fonctionnent encore en Suisse. Ils gaspillent un courant précieux au moment où il est le plus rare, pendant le semestre d’hiver. Ils sont alors responsables d’environ 20% de la consommation totale d’électricité. Le MoPEC de 2014 contient certaines prescriptions pour le remplacement des chauffages électriques. Mais elles sont insuffisantes et près de la moitié des cantons ne les ont pas encore intégrées dans leur législation. Il faut maintenant une obligation de remplacement pour tous les chauffages électriques, qui soit rapidement mise en œuvre.

Energie solaire pour tous les bâtiments
Seule une petite partie des toits suisses est équipée de panneaux photovoltaïques. Pour que la transition énergétique réussisse et que la sécurité d’approvisionnement soit garantie, il faut un standard solaire pour les nouvelles constructions et les rénovations complètes de toitures. Il en va de même pour les façades à fort ensoleillement. En outre, il est nécessaire d’établir une feuille de route indiquant la date à laquelle les grands bâtiments existants, et plus tard les plus petits, devront être actifs sur le plan solaire.

Aujourd’hui, il arrive souvent qu’un toit ne soit que partiellement recouvert de modules PV, comme le montrent des études. Avec la rétribution minimale de l’électricité solaire préparée par le Parlement fédéral, la construction d’une installation PV deviendra définitivement une affaire rentable pour tous. Une raison de plus d’utiliser toutes les surfaces qui conviennent à la production d’énergie solaire; c’est la base du virage énergétique.

Fin du gaspillage énergétique pour tous les bâtiments
Un quart des bâtiments en Suisse consomme plus que les trois quarts restants du parc immobilier. Ces gouffres énergétiques devraient être assainis de toute urgence. Mais les choses avancent bien trop lentement pour atteindre les objectifs climatiques de la Suisse. C’est pourquoi il faut une réglementation qui exige que les bâtiments les moins efficaces soient rénovés (ceux des catégories F et G de l’étiquette énergétique cantonale CECB). Le canton de Vaud montre l’exemple: son projet de nouvelle loi sur l’énergie contient une obligation d’assainissement.

Obligation de planification énergétique au niveau communal
Une bonne planification énergétique assure la sécurité de la planification dans les communes et pour les propriétaires immobiliers. Si l’on connaît, pour chaque parcelle, les options d’approvisionnement en chaleur disponibles à l’avenir, tous les acteurs pourront prendre des décisions optimales sur le plan économique et pour la protection du climat.

Les réseaux de gaz, très répandus, constituent le point crucial. Ils devront être redimensionnés dans les années à venir, car il n’y aura pas assez de biogaz pour les faire fonctionner de manière climatiquement neutre. Winterthour, par exemple, montre la voie: dans le cadre d’un plan énergétique, des zones de la ville ont été identifiées dans lesquelles des réseaux de chauffage urbain doivent être étendus ou construits en remplacement. Dans d’autres zones, la commune mise surtout sur des pompes à chaleur. Parallèlement, l’approvisionnement en gaz est supprimé. La sécurité de planification pour les propriétaires d’immeubles et les exploitants des réseaux de chaleur est ainsi assurée.

Sans l’engagement des cantons, rien n’est possible
Un projet, aussi bon soit-il, ne sert à rien s’il prend la poussière dans un tiroir. Le constat est flagrant dans le cas du MoPEC de 2014: bien que la dernière version date de presque dix ans, certains cantons n’ont encore rien mis en œuvre. De nombreux autres sont restés bien en deçà du projet de l’EnDK avec leurs lois sur l’énergie, ce qui a provoqué plusieurs centaines de milliers de tonnes d’émissions de CO2 supplémentaires. Le climat et nous tous en payons le prix fort.

C’est pourquoi l’assemblée plénière de l’EnDK doit non seulement adopter aujourd’hui un projet efficace, mais aussi insister auprès des cantons pour qu’ils le mettent rapidement en œuvre.

Contact:
Pierrette Rey, porte-parole du WWF Suisse, tél. 021 966 73 75, pierrette.rey@wwf.ch